1- Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, présentez-vous.

” Je suis un Français qui a la chance d’avoir sur les événements en cours un minimum de lucidité. J’observe l’actualité dérouler le long développement de son horreur et j’essaie d’en tirer des pistes de réflexions. Je m’intéresse à diverses disciplines et tente d’en faire des outils de compréhension du monde (philosophie, psychologie, sociologie, histoire, littérature). Je n’appartiens à aucun parti, ce qui me place un peu à la manière de Raymond Aron dans la peau d’une sorte de « spectateur engagé » : spectateur car j’assiste — malheureusement — à l’interminable écroulement de la civilisation sans y jouer aucun rôle politique ou associatif actif, et engagé en ce sens que je tente, à ma petite échelle, d’alerter mon entourage au sujet des bouleversements en cours. C’est peu de choses mais si chacun en faisait autant, nous serions des millions à ouvrir les yeux.

J’ai par ailleurs publié deux ouvrages : un essai critique sur l’œuvre et la pensée de Michel Onfray en 2014 (et qui vient d’être réédité début 2021), et Coronavirus, autopsie d’un désastre politique, aux Éditions Altitude en 2020. Depuis plusieurs années, je publie des articles ici ou là et j’anime une chronique littéraire sur la chaîne YouTube Radio Athéna. Je suis aussi à l’initiative de La délégation des siècles, vaste entreprise éditoriale qui travaille à remettre en circulation des textes, des livres et des auteurs inconnus ou pas assez connus, et dont la réunion dans une même collection permet aux lecteurs de se cultiver et de se construire une pensée de droite, enracinée et patriote solide et cohérente.”

2-: Qu’est-ce qui vous a amené à lancer votre projet ? Quelles sont les étapes qui vous y ont menées ?

” J’y ai été amené par la nécessité. Nous vivons des temps difficiles et devant eux il y a deux principales positions à adopter : le fatalisme, la résignation, c’est-à-dire considérer que tout est joué, que nous sommes perdus et qu’il convient maintenant d’abdiquer ; ou se battre. J’ai fait le choix du combat, par tempérament, par principe et parce que je refuse que les destructeurs l’emportent sur les bâtisseurs. Je refuse que le laid l’emporte sur le beau, que les barbares l’emportent sur la civilisation. Or, il se joue en ce moment un combat pour ainsi dire eschatologique, quelque chose de gigantesque qui devra aboutir soit à la disparition de la civilisation, soit à son sauvetage. Nous sommes donc à un moment crucial, déterminant et révolutionnaire de l’histoire de notre humanité. Comme dans un bateau en train de couler, il faut maintenant que tous les braves se remontent les manches et aident à évacuer l’eau qui menace de nous engloutir tous. “

3-: Pouvez-vous nous expliquer plus en détail en quoi consiste vos projets, votre démarche et pourquoi vous faites ce que vous faites ?

” Par exemple en ce qui concerne l’entreprise éditoriale La délégation des siècles, l’idée consiste exactement à «refaire des esprits français». Nos contemporains ont été lessivés par des décennies d’Éducation nationale politisée qui n’a pas travaillé à consolider leur conscience française. Au contraire il s’est agit depuis longtemps de faire des écoliers français des citoyens du monde, déracinés, en leur faisant croire que le destin de telle peuplade à l’autre bout du monde devait les concerner autant, sinon plus que le sort de leur propre pays. À cette propagande s’est ajoutée l’énorme agitation médiatique qui a achevé de transformer notre pays en troupeau de moutons consommateurs, ignorants tout d’eux-mêmes et intéressés seulement par les modes « musicales » et vestimentaires. Pour parvenir à installer cette horrible jonction entre la culture MTV et l’idéologie Benetton, il a été nécessaire pour eux de détruire, d’effacer, de ringardiser, d’anathématiser tout ce qui était susceptible d’intéresser les Français à leur propre identité. À La délégation des siècles et à Radio Athéna, nous travaillons à corriger le tir en remettant dans les mains de nos contemporains les livres et les auteurs qui malheureusement n’y sont plus, afin précisément qu’ils renouent, qu’ils se réconcilient avec ce qu’ils sont. Nous sommes donc dans une démarche de réappropriation d’un patrimoine que l’on nous a appris à ignorer, voire à combattre. “

4-: Quelles sont vos principales sources d’inspiration, vos influences et vos références ?

” Ma principale source d’inspiration et même de motivation s’appelle le sens du devoir. Je sens, je sais que je suis redevable, que je dois à mes parents, qui le doivent aux leurs, d’être quelqu’un, d’être l’héritier d’une culture, d’une civilisation, d’un pays, d’habitudes et de mœurs. Je refuse d’être le simple consommateur égoïste d’un patrimoine bâti par tellement d’anciens, par tellement de générations besogneuses et méritantes, un patrimoine dont je profiterais de l’essence sans me soucier ni d’où il vient ni des enfants à qui nous devons le transmettre. Je refuse d’être cet égoïste individualiste, à la fois nihiliste et hédoniste que l’époque me commande d’être. Je porte une charge avec fierté, et mon honneur, mon devoir, le sens de ma vie est d’être à la hauteur de cet héritage en le transmettant le plus conforme à ce qu’il était lorsque je l’ai reçu. Je puise donc mon inspiration dans l’exemple de mes prédécesseurs, sans qui je ne suis rien.”

5-: Qu’est-ce que le conservatisme selon vous ? Et pensez-vous qu’il est important aujourd’hui ?

” Barrès parlait du nationalisme comme de « l’acceptation d’un déterminisme ». Depuis des milliers d’années, les hommes avaient conscience d’être un maillon dans la longue continuation des générations. Il s’agissait de perpétuer une œuvre. De nos jours, les hommes s’imaginent pouvoir s’extraire de tous les déterminismes de leur naissance, par idéologie, par révolte, par caprice, par fierté. Beaucoup vont jusqu’à devenir autre chose que ce qu’ils sont naturellement. Ils changent de pays, de religion, de culture, d’habitudes, de sexe aussi maintenant. Je ne comprends pas que l’on puisse y voir un progrès. Personnellement, lorsque je vois quelqu’un démolir une cathédrale pierre par pierre, je n’y vois pas un progrès ni rien de positif : je vois un type qui détruit, qui détricote, qui abolit un héritage, qui fait œuvre de destruction.

Alors pour répondre à votre question, ce que j’appelle le « conservatisme » (même si ce n’est pas le mot que j’utiliserais), c’est empêcher qu’un cuistre vienne démolir mon église, mon village, mes habitudes héritées, ma culture, etc. Le « conservateur » dans ce cas est un gardien.”

6-: Que pensez-vous du contexte actuel de la société en Europe ? Et à l’échelle du monde ?

“Nous sommes à un moment particulier de notre histoire où, contrairement aux générations passées qui travaillaient à transmettre quelque chose à leurs enfants, nous autres nous ne savons pas s’il restera quelque chose à transmettre. Un immense mouvement iconoclaste, révolutionnaire et capricieux, est en train, en quelques années seulement, d’abattre des siècles d’habitudes. La facilité avec laquelle nos contemporains acceptent de se renier est proprement hallucinante, il faut parfois se pincer pour vérifier que l’on n’est pas dans un cauchemar. Et il est évident que rien de tout cela n’arrive pas hasard : des gens sont à la manœuvre qui encouragent, financent et provoquent ces événements dans un but idéologique. Ils ont pour le moment toutes les cartes en main pour réussir, malheureusement. Dans ce climat surréaliste et étouffant, nous autres sur qui la lobotomie n’a pas fonctionnée sommes en quelque sorte des survivants.

La situation est à la fois explosive et contrôlée. En ce sens que les éléments capables de provoquer une réaction (émeutes, révoltes, sécession, etc.) sont là, mais en face le pouvoir, les médias, les scénaristes de ce monde parviennent pour le moment à en contrôler l’ébullition par une savante maîtrise de l’ingénierie sociale. Combien de temps une telle situation peut durer avant d’exploser, et peut-elle exploser d’ailleurs ? Impossible de répondre à ces questions. Nous devons travailler à une reprise en main de notre destin, entre autres pour éviter une issue violente.”

7-: Si vous deviez donner 5 éléments sur lesquels tout Français ou Européen devrait sérieusement travailler au niveau individuel, lesquels seraient-ils ?

” 1. Bâtir un foyer français. C’est-à-dire s’établir dans un métier, fonder une famille et faire des enfants que l’on éduquera de la meilleure manière possible.

2. Prendre ses distances avec le vacarme médiatique et politique. Ce qui implique de réduire son temps d’exposition aux médias, refuser la dictature des réseaux sociaux, rejeter les nouvelles modes idéologiques. Bien prendre conscience que la plupart des agitateurs qui prétendent apporter des solutions font en réalité partie du problème.

3. Se réapproprier sa culture. Lire des livres, visiter des lieux historiques, arpenter les rues de nos villages, discuter avec les anciens, faire son arbre généalogique, s’intéresser aux traditions populaires et les perpétuer. Renouer avec la religion catholique, oser pousser la porte d’une église, chercher la foi ou la protéger lorsqu’on l’a déjà.

4. Développer son courage. Le courage de dire non aux persécuteurs et aux lubies de l’époque. C’est-à-dire travailler à se construire une solidité intellectuelle, morale, mentale et nerveuse. Ce n’est pas parce que douze adolescentes à cheveux violets disent sur Twitter que la transphobie est un crime qu’il faut les croire.

5. Retrouver le plaisir d’être Français. Car nous oublions trop souvent qu’être Français est également un bonheur, une chance, un plaisir tout simplement. Se retourner sur quinze siècles et admirer l’œuvre de nos anciens, se dire que l’on est la continuation de ce lignage glorieux, c’est une charge évidemment mais cela doit aussi être un plaisir, un bonheur, une joie quotidienne. Je suis fier d’être Français, ce qui implique que j’ai plaisir à l’être.”

8-: Pouvez-vous nous partager votre ressenti sur la jeunesse d’aujourd’hui ?

” Je n’ai malheureusement pas un avis très favorable sur elle. Tout a été fait pour qu’elle perde son sens critique, son intelligence individuelle et collective, et hélas l’objectif a été atteint dans une large mesure. Il reste des ilots de résistance mais la pression sociale est grande, surtout à l’ère des réseaux sociaux. Dans ce contexte, un jeune qui continue de revendiquer son identité n’est pas seulement un jeune courageux et audacieux, il est un héros. Résister à cette pression lorsque l’on a 20 ans, c’est héroïque. Or, comme à tous les temps, les héros sont toujours une minorité. Je ne suis pas optimiste pour la suite, hélas, mais je travaille pour que les faits à venir me donnent tort”.

9-: Quels sont les principaux dangers qui menacent la civilisation européenne selon vous ?

” Inévitablement le Grand remplacement. Une civilisation n’est pas seulement un corpus de conventions sociales partagées par des gens dont le seul point commun serait de vivre au même endroit. Une civilisation est tout cela circonscrit dans une identité fondée par l’hérédité. Je ne deviendrais pas sénégalais demain si je m’inscris subitement dans un club de lutte sénégalaise et que j’ajoute le Poulet Yassa dans mon alimentation. Je dois citer Barrès :

« Pour nous, la patrie est avant tout une terre et une entente avec ceux qui nous engendrèrent selon la chair ».

Autrement dit, si nous sommes grand-remplacés un jour, peu importe que ce pays s’appelle encore la France, car ce ne serait plus la France. La menace est aussi intérieure, c’est le renoncement. Le renoncement est même la porte par laquelle toutes les autres menaces peuvent entrer. Nous devons refuser la politique du renoncement, de la repentance, de la négation, de l’affaiblissement. Nous devons nous réconcilier avec le spirituel et les mystères, cesser de nous contenter d’être un amas cellulaire errant sans autre but que la consommation et la jouissance du moment.”

10-: Quels sont les principaux espoirs et leviers qui permettraient de surpasser ces menaces ?

Tout ce que j’ai dit plus haut, pour commencer.”

11-: Quels sont les personnalités, auteurs, initiatives ou organisations qui paraissent dignes d’intérêt aujourd’hui selon vous ?

” Dans des styles très variables, il y a par exemple cette nouvelle génération de créateurs de contenus sur Internet qui contribue à administrer à nos contemporains l’électrochoc dont ils sont besoin pour se viriliser mentalement : Papacito, Baptiste Marchais, sportif de haut niveau qui assume d’être un gaulois réfractaire imperméable à la propagande progressiste, le collectif qui gravite autour du sculpteur Missor (plusieurs chaînes YouTube, notamment Barbare civilisé, Florent Tavernier), Virginie Vota, Radio Athéna évidemment. Il y a beaucoup d’autres gens. Par exemple Laurent Obertone, Sud Radio qui a montré un immense courage depuis le début de la dictature sanitaire, Valeurs actuelles qui essaie timidement de ne pas courber l’échine.”

12-: Pouvez-vous nous donner un livre, un film et une musique, qui selon vous vous représente, ou auquel vous tenez ?

” Le Grand Meaulnes, d’Alain-Fournier. Je me reconnais autant dans l’introversion de François Seurel qui est plutôt un contemplatif qui rêve d’aventures, que dans Augustin Meaulnes qui est un aventurier qui rêve de contemplation. Ces deux personnages sont deux aspects de la personnalité d’Alain-Fournier, ce qui explique que je me sente aussi proche de lui, jusqu’à lui vouer une sorte de culte.

Côté film, Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, de Jean-Pierre Jeunet, me paraît excellent. Nostalgique et mélancolique, rêveur et idéaliste, comme je le suis. Qui plus est, ce film est une merveille visuelle, un plaisir de chaque seconde pour les yeux et pour le cœur. Et pour les oreilles, grâce à une bande originale elle-même de première facture.”

13-: Que pensez-vous pouvoir apporter à quelqu’un qui vous découvre ?

” J’oriente beaucoup ma communication sur les œuvres littéraires que je fréquente, et je tâche de transmettre ce goût autour de moi. J’ai la chance d’avoir eu la possibilité de beaucoup lire, de découvrir des auteurs oubliés et d’en avoir conçu un formidable outil de construction et de consolidation d’une pensée au service de mon pays. Mon objectif est que cette chance soit partagée avec d’autres. Lorsque je reçois un message dans lequel une personne me dit avoir découvert tel livre, tel auteur ou tel site historique grâce à moi, j’estime avoir rempli ma mission. Voilà donc ce que je peux, en tout cas ce que j’essaie d’apporter à quelqu’un qui s’intéresse à mes activités.”

14-: Quels sont vos projets à l’avenir ? Dans les prochaines semaines et mois, à court terme, mais également votre vision à long terme ?

” Je continue d’écrire, je souhaite publier des nouvelles et des romans. Et je travaille au développement de La délégation des siècles, qui est véritablement l’application grandeur nature de ce que je considère être la mission d’un Français conscient et engagé : la mission de transmettre les outils qui disent à nos contemporains ce qu’ils sont.”

15-: Où peut-on vous suivre ? Sur quel média ou réseau êtes-vous le plus actif ?

“Je publie des billets presque quotidiennement sur Facebook (Jonathan Sturel), et je suis présent également sur Telegram ( https://t.me/JonathanSturel ). J’interviens aussi régulièrement sur Radio Athéna, donc.”

17-: Un mot pour la fin ?

“On ne peut pas subir et lutter en même temps. Alors luttons pour ne pas subir.”