Voici le début d’une longue série d’articles qui retracent les grands moments de l’Histoire, que vous pouvez retrouver à tout moment dans la catégorie History. La Seconde Guerre mondiale sera le premier conflit abordé.
En guise de contexte pour introduire la Seconde Guerre mondiale, voyageons d’abord en Asie. Le Japon y poursuivait sa montée en puissance. Pour bien comprendre ce qui mena le Japon à la guerre totale, il faut en expliquer les conflits externe et interne. Luttant depuis des décennies pour éviter la colonisation européenne, le Japon privilégiait pour sa politique extérieure la force tout en se gardant d’inquiéter outre mesure les Occidentaux. De cet équilibre périlleux naquit néanmoins un empire. Depuis son étonnante victoire maritime à Tsushima en 1905, qui avait vu le Japon, alors pourtant considéré comme une puissance inférieure car non-occidentale, vaincre le puissant Empire russe, la puissance japonaise n’avait cessé d’augmenter.
Le Japon annexa la Corée en 1910. Se rangeant du côté de l’Entente lors de la Première Guerre mondiale, le Japon s’arrogea le privilège de s’emparer des nombreux territoires allemands du Pacifique. Cet expansionnisme mettait en péril le fragile équilibre de l’Asie. C’est que la Chine, expérimentant le « siècle de l’humiliation », vivait l’une des périodes les plus dures de son histoire et manquait de s’effondrer. Une telle déliquescence de la Chine menaçait le commerce hautement profitable aux Occidentaux dont elle était le centre névralgique en Asie. Les Etats-Unis s’échinèrent alors à tempérer l’expansionnisme japonais pour permettre la survie de la lucrative Chine. Il faut dire que le Japon impérial s’industrialisait avec une célérité peu commune. On l’a compris, la politique extérieure japonaise était bicéphale mais surtout contradictoire. Il faut désormais y superposer un conflit interne.
Dans le Japon impérial, le pouvoir était détenu par les militaires. Cependant, la Marine et l’armée de terre n’avaient ni les mêmes objectifs ni les mêmes ennemis désignés. La Marine considérait le péril américain comme le premier, celui qu’il convenait d’éliminer pour s’emparer de l’Asie du Sud-Est et agrandir l’empire sans heurts. L’armée de terre, elle, considérait le « péril rouge », que représentaient les Soviétiques, bien plus préoccupant. Marine et armée se disputant les crédits annuels (part du budget annuel leur étant allouée) fut la résultante de ce conflit, dont je vous épargne quelques complications. En 1931, ce ne fut ni le gouvernement ni l’empereur Hiro-Hito qui ordonnèrent de s’emparer de la Mandchourie. Le gouvernement fut placé devant le fait accompli par des boutefeux Japonais.
La guerre en Asie
De nombreuses petites poussées supplémentaires s’opérèrent sans que la guerre n’éclate avec un Tchiang Kaï-shek se sachant incapable de faire face avec sa Chine nationaliste si fragilement unie. Le 7 juillet 1937, ce ne fut pas non plus l’Empereur qui ordonna d’attaquer le Chine. L’incident du pont Marco Polo (nord-est de la Chine) ne tint à rien et enclencha une escalade démesurée. Pourtant, Tokyo acceptait toujours le fait accompli et le cautionnait même. Pour garder son assise sur la Chine, Tchiang Kaï-shek devait garder sa légitimité. Ni Nankin, ni Tokyo ne souhaitait en réalité cette guerre : elle aurait pu être évitée facilement. D’autant que viser la Chine alors que l’ennemi désigné était, au choix, l’URSS ou les Etats-Unis n’était pas un bon calcul pour le Japon qui espérait cette guerre courte, à tort. Sans compter que le péril rouge se précisait.
Le fait que le Japon ait signé avec l’Allemagne et l’Italie le pacte anti-komintern en 1936 (le komintern désigne l’URSS et son idée de communisme international) engendra des tensions entre le Japon et l’URSS autour de la Mongolie. En 1938, l’URSS soutint officiellement la Chine (nourriture, matériel, conseillers, ingénieurs …) contre l’envahisseur japonais. La même année, la première bataille à la frontière survint au lac Khassan. L’URSS, voyant la puissance de l’Allemagne nazie (alliée au Japon) grandir en Europe, voulait défaire les Japonais pour s’assurer qu’ils n’attaqueraient plus par la suite. En mai 1939, un nouvel incident survint, engageant la bataille de Khalkin Gol, remportée par les Soviétiques.
Avec le pacte de non-agression germano-soviétique (1939), le Japon se résigna à également signer un traité avec l’URSS, ce qui desservira plus tard grandement Hitler (on y reviendra). Le Japon, qui favorisait une stratégie d’expansion terrestre, lui préférait désormais une stratégie maritime, motivant la guerre contre les Américains. De fait, le Japon, pour s’agrandir, à part en Chine, devait forcément fâcher un grand d’occident. Qu’on en juge : le Raj (Inde, Pakistan, Bangladesh et Birmanie actuels), Hong-Kong, la Malaisie et Singapour étaient aux Britanniques ; l’Indochine (Viêt Nam, Cambodge et Laos actuels) à la France ; les Philippines aux Etats-Unis ; les Indes Orientales (Indonésie actuelle) aux Néerlandais ; l’Australie faisait partie du Commonwealth britannique et l’URSS menaçait au nord. Le Japon décidera de tous les fâcher en même temps.
La montée des totalitarismes en Europe
Alors que l’Europe se pacifie enfin, après la boucherie de la Grande Guerre (1914-1918) et ses remous jusque dans les années 1920, les totalitarismes s’éveillent. Le premier sera le moins parfait : Mussolini, créa le parti national fasciste (PNF) en 1921, profitant de la « victoire mutilée » italienne de 14-18. Car l’Italie était sortie meurtrie de la Grande Guerre sans avoir reçu, comme l’avaient promis les puissances de l’Entente, les terres qu’elle revendiquait : en particulier les terres irrédentes. Par son antisocialisme et son antisyndicalisme, Mussolini s’attira le soutien de la bourgeoisie et de la classe moyenne. Le 28 octobre 1922, avec les « chemises noires », Mussolini intimida l’état et forma un nouveau gouvernement. Dès 1925, son parti devint le seul et il s’arrogea des pouvoirs dictatoriaux.
Adolf Hitler s’inspira de Mussolini et, à la tête du parti qu’il venait de refonder, le Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP), ou parti « nazi », tenta le putsch de la Brasserie, à Munich, contre la République de Weimar en 1923. Le régime weimarien était effectivement très faible, démuni de forces armées satisfaisantes, accablé par les indemnités de guerre, mais ne tomba pas si facilement. Le putsch était manqué, Hitler jeté en prison.
A sa sortie, il reprit la tête du NSDAP et profita de la double crise économique (1921-1923 avec l’hyperinflation puis 1929 avec la Grande Dépression) qui augmenta la misère et le chômage en Allemagne, pour gagner les élections de 1933. Le 30 janvier 1933, Hitler devint chancelier ; interdit les autres partis après l’incendie du Reichstag le 27 février ; contrôla la population et fit arrêter, par les SA et SS, les opposants (surtout communistes) pour les déporter dans les premiers camps de concentration dès 1933 ; purifia son parti avec la nuit des longs couteaux en 1934 ; cumula les titres de chancelier et président d’Allemagne à la mort du maréchal Hindenburg en août 1934 ; et promulgua des lois antisémites (dites de Nuremberg) en 1935.
La Première Guerre mondiale précipita l’Empire russe dans le gouffre par les révolutions russes de 1917. Du chaos de la guerre civile, l’URSS émergea. Staline y élimina tous ses opposants politiques, souvent physiquement, après la mort de Lénine en 1924. Il accéda à la fonction de secrétaire général du parti communiste et instaura le socialisme dans un pays. Son régime devint totalitaire, le « grand tournant » s’opéra avec la collectivisation des terres (1929-1933), s’accompagnant de la dékoulakisation (chasse aux riches paysans), causant également la terrible famine d’Ukraine (Holodomor : 1932-1933) ; mena les procès de Moscou (truqués) en 1936 puis la Grande Purge (1937-1939) pour renouveler les responsables politiques et éliminer des opposants potentiels. Il décapita également l’Armée rouge de ses hauts dirigeants.
Les forces de l’Axe enclenchent l’engrenage
L’Allemagne et le Japon, puis également l’Italie, signèrent le pacte anti-Komintern en 1936, dirigé directement contre l’URSS. L’Allemagne nazie condamnait le « judéo-bolchévisme » dans son programme et Hitler comptait conquérir « l’espace vital » (Lebensraum) nécessaire aux colons allemands pour un IIIe Reich allemand censé durer 1 000 ans. Mais pour l’heure, Hitler ne tenait pas à entrer en guerre contre le géant soviétique. Et puis, l’ennemi héréditaire se trouvait à l’ouest : la France. Lorsque la guerre civile espagnole éclata (1936-1939), Franco, fachiste, s’opposant au gouvernement socialiste du Frente Popular ; l’Italie et l’Allemagne soutinrent sans réserve Franco, tout comme l’URSS soutint le Frente Popular. La France et le Royaume-Uni étaient les grands absents de cette équation, ils ne s’impliquèrent qu’avec la plus grande prudence pour préserver la paix européenne.
Pourtant, en France, la IIIe République était celle du Front Populaire. Il est à noter que les démocraties étaient bien seules dans cette Europe de régimes totalitaires ou autoritaires. Barcelone et Madrid tombèrent finalement en 1939, Franco triompha. Pour l’Allemagne et l’Italie, cette guerre civile fut l’occasion de mettre en œuvre des stratégies militaires, notamment aériennes, qui furent utilisées lors de la Seconde Guerre mondiale. En 1938, Hitler annexa l’Autriche (Anschluss) et revendiqua les Sudètes tchécoslovaques dont la population était majoritairement allemande, provoquant de vives tensions.
Cette même année, Daladier (France), Chamberlain (Grande-Bretagne), Mussolini (Italie) et Hitler (Allemagne) organisèrent la conférence de Munich durant laquelle les représentants des démocraties franco-britanniques, farouchement pacifistes, cédèrent pour sauver la paix. Mussolini apaisa les inquiétudes, les Sudètes revenaient à l’Allemagne et Hitler promettait de ne plus rien annexer. Mais à peine la crise des Sudètes fut-elle réglée qu’Hitler chercha à s’emparer de l’entière Tchécoslovaquie. En 1939, Hitler viola délibérément les accords de Munich et s’empara d’une large partie de la Tchécoslovaquie. Après tout, il violait déjà allègrement le traité de Versailles de 1919, le « coup de poignard dans le dos » comme le surnommait Hitler, en réarmant l’Allemagne. L’Italie n’était pas en reste et annexait l’Albanie où elle avait déjà une grande influence. Ce n’était là que la première étape d’une ambition immense de rétablir un territoire digne de l’Empire romain ; une ambition qui commençait par l’invasion de la Grèce selon Mussolini.
L’Allemagne et l’Italie signèrent le pacte d’acier en 1939, établissant l’alliance militaire des puissances de l’Axe Rome-Berlin. Hitler était un diplomate de talent, il jouait un temps la brutalité, un autre la douceur. En août 1939, le pacte de non-agression germano-soviétique (pacte Molotov-Ribbentrop) surprit l’Europe et contenait surtout une clause secrète du partage de la Pologne. Cette dernière, pour avoir un accès à la mer Baltique, coupait le IIIe Reich en deux. On n’oubliera pas non plus que la Pologne avait été formée sur les débris des empires allemand, austro-hongrois et russe en 1918 et qu’elle s’était agrandie aux dépends de l’URSS, ce que Staline n’avait pas oublié.
La guerre éclate en Europe
Le 1er septembre 1939, après un faux incident (de Gleiwitz) et un ultimatum, l’Allemagne attaqua la Pologne. Celle-ci ne put se défendre, surtout lorsque l’URSS l’attaqua sur ses arrières le 17 septembre. La Pologne, seule, fut défaite le 6 octobre. La France et la Grande-Bretagne avaient pourtant déclaré la guerre à l’Allemagne le 3 septembre, mais n’avaient pas agi. Les Alliés préférèrent miser sur la défense avec la ligne Maginot. Quelle erreur ! Hitler avait tout le temps de préparer son attaque à l’ouest. De fait, il attaqua d’abord au nord en avril 1940 : le Danemark et la Norvège, pour sécuriser la route du fer provenant de la Suède neutre.
Le Führer attaqua enfin à l’ouest l’ennemi héréditaire : la France. Pour cela, il rusa en faisant une diversion le 10 mai 1940 là où on l’attendait : en Belgique, au nord ; alors que le point critique de son plan était de percer par les Ardennes, forêt pourtant réputée infranchissable, surtout avec des tanks. C’est précisément là qu’Hitler lança ses colonnes blindées et piégea au nord les Alliés. Ces derniers, qui n’avaient pas de réserve stratégique (quelle erreur !), en furent réduits à se replier sur le port de Dunkerque pour réembarquer vers l’Angleterre. La fuite fut un succès, 300 000 soldats Alliés s’échappèrent grâce au sacrifice de milliers de Français qui défendaient la ville.
Dès lors, la France n’avait plus les moyens de se défendre. C’est ce moment que choisit la courageuse Italie pour déclarer la guerre à la France le 10 juin. L’offensive italienne se brisa lamentablement sur les Alpes contre des chasseurs alpins particulièrement efficaces. Les Allemands, eux, étaient inarrêtables. Tant et si bien que Pétain fut invité à prendre le pouvoir et demanda la cessation immédiate des combats le 17 juin 1940. Le 18, de Gaulle appela à la résistance depuis Londres. Le 22, l’armistice franco-allemand fut signé. L’Angleterre, elle, resta de la partie. S’engagea alors la Bataille d’Angleterre : la Luftwaffe (armée de l’air allemande) affronta la Royal Air Force pendant des mois. La technique du Blitz, qui consistait à viser spécifiquement les villes historiques et densément peuplées, prit le pas sur le duel aérien. Les bombes pleuvaient sur Londres. Churchill, Premier ministre et moteur de la résistance, était le dernier mais pugnace ennemi du Führer. Il se démena pour amener tant l’URSS que les Etats-Unis dans le conflit. Pendant ce temps, Mussolini décida d’attaquer l’Egypte britannique et la Grèce. Les deux opérations furent de cuisants échecs. Le soldat italien était courageux mais mal commandé, mal équipé, mal nourri, car la logistique était mal gérée. Hitler devait secourir son allié italien. Pour ce faire, il envoya Rommel, général compétent, en Afrique du nord pour relever la situation. L’Afrika Korps fut créé et l’offensive relancée. Le Führer s’occupa ensuite des Balkans. Il attaqua début avril 1941 la Yougoslavie, réalisant son plus bel exemple de Blitzkrieg réussi puis poursuivit contre la Grèce. Les deux pays furent terrassés en moins de deux mois. Hitler fit cesser le Blitz sur Londres. Il avait mieux à faire : il devait maintenant conquérir l’espace vital pour la « race aryenne ».
Le début de la guerre germano-soviétique
Hitler, faisant fi du pacte de non-agression signé moins de deux ans plus tôt, attaqua sans déclaration de guerre l’URSS le 22 juin 1941. C’était la plus grande invasion de l’Histoire : 3,8 millions d’hommes s’élancèrent dans l’immensité russe ! L’armée était scindée en trois pour poursuivre autant d’objectifs distincts : Léningrad, berceau du Bolchévisme, objectif idéologique ; Moscou, objectif politique ; Kiev, objectif économique. L’invasion fut spectaculaire : les Allemands mirent le siège sur Léningrad début septembre 1941. Kiev tomba également en septembre mais avait nécessité un détour du groupe d’armées centre. Ce délai, exigé par Hitler, fit perdre un temps précieux au groupe d’armées centre qui ne put marcher sur Moscou à nouveau que l’hiver venu. Les Allemands furent repoussés, alors qu’ils avaient atteint les faubourgs de Moscou, le 5 décembre 1941. Si l’URSS s’était montrée totalement désemparée de prime abord, elle se ressaisissait. D’ailleurs, Staline avait ordonné le déplacement en urgence de 1 500 usines de l’ouest vers l’est, derrière Moscou ! La capacité industrielle soviétique n’était pas anéantie, ce qui sera crucial ensuite. Avant d’aller plus loin, il nous faut rappeler que cette invasion fut suivie par les Einsatzgruppen, des hommes chargés d’exterminer les Juifs et les Slaves, « races » considérées comme inférieures et néfastes. Cette invasion occasionna donc la Shoah par balle : l’exécution sommaire des ennemis désignés du régime nazi. Un exemple donnera un goût de l’horreur que cache ces mots : les 29 et 30 septembre 1941, les Einsatzgruppen assassinèrent 33 771 hommes, femmes et enfants juifs au ravin de Babi Yar en Ukraine, un record.
La guerre prend une dimension mondiale
Le 7 décembre 1941, la guerre devint mondiale. Le Japon, qui était en guerre contre la Chine depuis 1937 alors que ses ennemis désignés étaient soit l’URSS soit les Etats-Unis, vit son armée s’enliser dans un conflit sans intérêt. Le Japon impérial avait besoin de ressources et surtout de pétrole. Or les Etats-Unis, plus grand fournisseur de pétrole, avait mis un embargo sur le Japon qu’ils jugeaient trop expansionniste. Alors le Japon décida, dos au mur, d’attaquer les Etats-Unis à Hawaï le 7 décembre 1941.
L’objectif de cette attaque surprise, sans déclaration de guerre, sur Pearl Harbor, était fondé sur la croyance naïve que toute la flotte américaine serait dans le port. Si le Japon pouvait priver les Etats-Unis de leur flotte dès la première action du conflit, alors les Américains pourraient renoncer à la guerre ou, dans le cas contraire, auraient bien du mal à devenir rapidement une menace. L’attaque, dépeinte aujourd’hui comme une fulgurante victoire, fut en réalité un fiasco stratégique. Le Japon ne coula définitivement que trois très vieux cuirassés. Pour autant, le Japon avait du mordant : des attaques se déchaînèrent partout en Asie du sud-est contre les territoires des puissances de l’ouest ; Philippines, Singapour, Hong-Kong, Indonésie, rien ne résista. Le Japon avait besoin des ressources naturelles de ces terres. Les Japonais, se considérant supérieurs aux autres asiatiques, voulaient libérer l’Asie du joug européen dans l’idée de former la « Grande Asie ». C’était troquer la domination européenne pour celle du « grand frère japonais ». Pendant ce temps, les Etats-Unis internaient 100 000 Japonais américains dans des camps, craignant la collusion avec Tokyo.
Hitler déclara la guerre aux Etats-Unis le 11 décembre 1941. Le Führer pensait, à tort, que s’il rejoignait le Japon dans sa guerre, ce dernier le rejoindrait dans la sienne contre l’URSS. Or, l’URSS était au bord du gouffre fin 1941. Le Japon n’en fera rien. C’est là que les conséquences du traité russo-japonais de 1939 prennent tout leur sens. La guerre mondiale était désormais engagée. Il est à noter que les Américains fournissaient déjà largement les Alliés et surtout l’URSS en matériel depuis juin 1941. Plus encore, les Etats-Unis s’étaient entendus avec le Royaume-Uni au début de l’année pour instaurer le principe de « L’Allemagne d’abord » (Germany First), désignant Berlin comme l’ennemi principal. Avant de finir 1941, il semble important de souligner que la résistance se développa en Europe. En France, certes, dès 1940 et surtout après le 22 juin 1941 (les Communistes rejoignant massivement la résistance). Mais pas seulement. La résistance se fit partout, même en Allemagne. Les organisations les plus handicapantes pour l’occupant allemand furent sans aucun doute les résistances polonaise, yougoslave (sous Tito) et russe, où de véritables armées partisanes sabotaient la logistique. Mettons un second pied dans l’horreur de la Shoah avec 1942 ; en janvier se déroula la conférence de Wannsee où fut décidée la solution finale : l’assassinat des Juifs (principalement) dans des camps, non plus de concentration, mais d’extermination. Nommons les plus ignobles : Auschwitz-Birkenau, Treblinka, Belzec, Sobibor, Chelmno, complétant l’action des dizaines de camps de concentration tels que Dachau et Buchenwald. La vaste majorité des camps de la mort furent construits en Pologne. Ce revirement était largement lié à l’échec de l’opération Barbarossa. En lien avec l’Holocauste, il nous faut dire que la France vichiste, régime collaborationniste, faisait tourner son industrie pour le Grand Reich, justifiant les terribles bombardements des Alliés sur le territoire français, mais prenait également le pli idéologique de l’occupant avec la rafle du Vél’ d’Hiv les 16 et 17 juillet 1942.
En 1942, Hitler réorganisa avec brio son armée sur le front de l’est et se prépara à l’assaut. Tout le monde pensait que Moscou serait la cible : ce sera en fait Stalingrad. Le Führer tenait là un plan fabuleux. Il manquera cependant de chance. Stalingrad, pour bien des raisons, fut tenue in extremis par les Soviétiques. Quel beau trophée c’eût été pour Hitler que de prendre une ville portant le nom de Staline ! Ce dernier ne le laissa pas faire. L’armée allemande du général Paulus fut enfermée dans la ville, soudainement encerclée par les Soviétiques. Rien ne pourrait sauver cette armée. Les Allemands étaient encore repoussés mais l’URSS demeurait au bord de la défaite.
1942 : Le tournant de la guerre
Dans le Pacifique et en Asie, le Japon semblait inarrêtable et infligeait des défaites humiliantes aux Européens mais surtout aux Britanniques qui furent repoussés jusqu’en Inde … Même Singapour, considérée comme une forteresse imprenable par l’amirauté britannique tomba en quelque jours. Pourtant, la bataille de Midway du 5 au 7 juin 1942 fut une décisive défaite maritime pour le Japon qui, il faut le dire, manqua cruellement de chance durant cet engagement face aux Américains. Sur terre, ces derniers se réveillèrent et un combat acharné commença, semblable à Stalingrad, toutes deux batailles charnières de la Seconde Guerre mondiale : c’était la bataille de Guadalcanal (sur une île au nord-est de l’Australie).
Ce n’est pas un hasard si 1942 est une année charnière du conflit. Les Alliés avaient industriellement repris le dessus. En 1942, l’Axe sortait 26 000 avions et 11 000 chars de ses usines, les Alliés en produisaient respectivement 100 000 et 58 000. Ajoutons également que la guerre des ondes (décryptage) tourna en faveur des Alliés avec les premiers craquages des codes allemands (comme la fameuse Enigma, dont le code fut définitivement cassé l’année suivante).
En juillet 1943 se joua sur le front de l’est la plus grande bataille de blindés de l’Histoire à Koursk. Ce fut une victoire tactique mais une défaite stratégique pour l’Allemagne : ses blindés étaient meilleurs mais trop peu nombreux. Cette défaite allemande était décisive et marqua le véritable tournant de la guerre en Europe. Plus que Stalingrad, c’est à Koursk qu’Hitler prit pour la dernière fois l’offensive sur le front de l’est.
En Afrique du Nord, Rommel fut repoussé et un débarquement allié advint le 8 novembre 1942 au Maroc et en Algérie. La guerre du désert devint impossible pour Rommel qui se replia vers Tunis. 1943 s’ouvrait sur la perte d’une armée allemande à Stalingrad et sur l’abandon de Guadalcanal pour les Japonais, tous deux en février. Goebbels, ministre de la propagande du Reich, déclara alors la guerre totale. Les Alliés détruisirent l’Afrika Korps en Tunisie en mai puis débarquèrent en Sicile en juillet et enfin en dans la botte italienne en septembre 1943. L’invasion de la forteresse Europe avait débuté et les Alliés étaient décidés, depuis la conférence de Casablanca en janvier 1943, à accepter des puissances de l’Axe uniquement la capitulation sans condition. Le roi italien fit emprisonner Mussolini et signa derechef la paix avec les Alliés le 3 septembre. Hitler ne pouvait l’accepter : la Wehrmacht déferla sur l’Italie et rétablit autant la ligne de front que Mussolini au pouvoir.
Dans le Pacifique, les Japonais ne cessaient de reculer contre les Américains, signe annonciateur d’une défaite prochaine du Japon dans la partie asiatique de la Seconde Guerre mondiale. Toutes les îles furent perdues une par une. La flotte japonaise ne faisait déjà plus le poids contre la machine de guerre américaine. On notera la grande efficacité des sous-marins américains. Les Philippines et les Mariannes, étapes cruciales de la conquête du Pacifique, étaient en vue. En Asie du sud-est, les Japonais peinaient contre la Chine alors que les Britanniques repartaient à l’offensive en Birmanie. En 1944, les Mariannes puis les Philippines tombèrent après une opiniâtre résistance : le Japon était à portée des bombes. Du reste, la bataille pour les Philippines fut effroyable et la plus grande bataille maritime de l’Histoire, la bataille du Golfe de Leyte, s’y déroula. Toutes deux se soldèrent sur une victoire américaine.
Le Japon voyait sa machine de guerre se détraquer mais venait d’inventer une technique terrifiante et très efficace pour lutter contre la flotte américaine : les Kamikazes, le « vent divin », des pilotes écrasant leur appareil sur les navires ennemis. La perte de terrain dans le Pacifique ne trouvait pas d’écho en Asie où l’Empire du Soleil-Levant lança une inquiétante opération en Birmanie pour enrayer la contre-attaque britannique et déclencha une monstrueuse offensive, dite « Ichi-Go » contre la Chine nationaliste. Le Japon avait encore de la ressource.
Le débarquement de Normandie et la libération de la France
En Europe, les Alliés de l’ouest progressaient avec difficulté en Italie puis débarquèrent en Normandie le 6 juin 1944 et en Provence le 15 août 1944. Le second front en Europe, destiné à soulager l’URSS, décidé lors de la conférence de Téhéran en novembre 1943, se matérialisait. La progression, en Normandie, fut particulièrement difficile mais le front fut finalement percé et la route de Paris ouverte. La capitale française fut libérée le 25 août 1944. L’effort des Alliés se dirigea alors vers le Rhin, qui formait un formidable obstacle naturel. A l’est, les Soviétiques étaient inarrêtables : ils lancèrent l’opération Bagration le 22 juin 1944. Menée en même temps que le débarquement de Normandie à dessein, cette colossale opération détruisit totalement le groupe d’armées centre allemand.
La Wehrmacht (armée allemande) agonisait et dut réduire la ligne de front. Dès lors, l’Ukraine fut libérée, la Roumanie cessa les hostilités et fut envahie. Prise entre deux feux, l’Allemagne peinait à attribuer ses ressources mais donnait et donnera toujours largement priorité au front de l’est. On aurait d’ailleurs tort de considérer l’Allemagne comme industriellement anéantie avant cet instant. Grâce à la politique de décentralisation de production de Speer, le Reich tripla sa production d’armements entre 1942 et 1944 pour culminer en été 1944. C’est à ce moment que les produits de remplacements du Reich (Ersatz) vinrent à manquer. Les bombardements des Alliés tuaient moins l’industrie allemande que les civils. On peut citer à cet égard le bombardement de Dresde dans la nuit du 13 au 14 février 1945 qui tua 140 000 Allemands. A l’ouest, l’opération Market Garden, qui visait à parachuter des soldats derrière les lignes ennemies pour prendre les ponts du Rhin, fut un cuisant échec. Les Allemands résistèrent non seulement sur le Rhin mais lancèrent en plus une contre-attaque qui donna des sueurs froides aux Alliés en décembre 1944.
Le Grand Reich à l’agonie
En 1945, pourtant, les Alliés à l’ouest passèrent le Rhin et buttèrent sur la ligne Siegfried (Maginot made in Germany). Une fois cet ultime obstacle surmonté, les Alliés déferlèrent sur le territoire allemand. A l’est, les Soviétiques exercèrent une formidable pression et l’opération Vistule-Oder balaya les Allemands en janvier 1945. Berlin était en vue. Déjà les Alliés décidaient, avec la conférence de Yalta en février 1945, de l’Europe d’après-guerre et de l’occupation de l’Allemagne.
Les fronts ouest et est se rencontrèrent à Torgau sur l’Elbe le 25 avril 1945. Les Américains laissèrent le champ libre aux Soviétiques pour prendre Berlin. Staline tenait là une victoire politique inestimable. Les Soviétiques, comme toujours avec des effectifs délirants, fondirent enfin sur Berlin où était retranché Hitler. La ville fut érigée en forteresse pour l’occasion. L’objectif était le Reichstag (parlement). Devant l’inexorable progression soviétique, Hitler se suicida dans son bunker le 30 avril 1945. La ville déposa les armes le 2 mai. Le 8 mai, la capitulation sans condition de l’Allemagne nazie fut signée. La Seconde Guerre mondiale en Europe prenait fin.
La fin de la Seconde Guerre mondiale
Dans le Pacifique, 1945 s’annonçait sanglante. Les Alliés progressèrent en Birmanie puis en Indochine. Les Américains abordèrent enfin les îles les plus proches du Japon. Les batailles d’Iwo Jima (février-mars) et d’Okinawa (avril-juin) furent si sanglantes que le projet d’invasion du Japon-même fut abandonné. La crainte des Kamikazes qui occasionnaient des pertes significatives, aggrava la chose. Iwo Jima, Okinawa, les Kamikazes, Le Japon voulait dissuader les Américains d’envahir l’archipel nippon, c’était chose faite. Le résultat ne fut cependant pas celui escompté. Après un ultimatum et des bombardements meurtriers du Japon, les Américains lâchèrent la première bombe nucléaire le 6 août 1945 sur Hiroshima. Une unique bombe terrassa la ville (140 000 morts).
Les Soviétiques entrèrent alors en guerre contre le Japon le 8 août 1945. La Mandchourie (région au nord des Corées) fut envahie extrêmement rapidement par les Soviétiques. Néanmoins, pour montrer aux Japonais que cette bombe atomique n’était pas la seule que possédaient les Etats-Unis, une seconde bombe atomique fut lâchée, cette fois sur Nagasaki, le 9 août 1945 (70 000 morts). Le Japon demanda l’arrêt des combats le 15 août. La capitulation sans condition fut signée le 2 septembre 1945 : le Japon n’avait d’autre choix, les Alliés s’étaient engagés à exiger cette conclusion de la guerre lors de la conférence de Potsdam (juillet-août 1945). La Seconde Guerre mondiale prit fin, laissant le monde plonger dans la guerre froide.
Sources (texte) :
Keegan, John (2009). La Deuxième Guerre mondiale. Paris : Perrin, 817p.
Bernard, Nicolas (2015). La Guerre germano-soviétique, 1941-1943. Paris : Tallandier, 448p.
Bernard, Nicolas (2015). La Guerre germano-soviétique, 1943-1945. Paris : Tallandier, 576p.
Bernard, Nicolas (2016). La Guerre du Pacifique, 1941-1945. Paris : Tallandier, 816p.
Lopez, Jean ; Wieviorka, Olivier (2015). Les mythes de la Seconde Guerre mondiale. Paris : Perrin, 350p.
Lopez, Jean ; Aubin, Nicolas ; Bernard, Vincent (2018). Infographie de la Seconde Guerre mondiale. Paris : Perrin, 192p.
Rémond, René (2002). Le XXe siècle de 1914 à nos jours. France : Éditions du Seuil, 306p.
Touchard, Patrice ; Bermond-Bousquet, Christine ; Cabanel, Patrick ; Lefebvre, Maxime (2010). Le siècle des excès, de 1870 à nos jours. Paris : Puf, 780p.
Quétel, Claude (2015). Histoire d’un monde en guerre. France : Editions Larousse et Editions Mémorial de Caen, 530p.
« L’Atlas des empires » (2019, janvier). Le Monde, no 27 (numéro spécial), p. 122-123 ; 148-149.
« 1939-1945, la Seconde Guerre mondiale » (2015, mai-juin-juillet). La Marche de l’Histoire, no 05 (numéro spécial).
Sources (images) :
https://it.wikipedia.org/wiki/File:Mengjiang_map_1939.svg (Possessions japonaises en 1939)
https://slideplayer.fr/slide/3188293/ (Invasion de la Pologne en 1939)
https://forum.il2sturmovik.com/topic/4789-summer-maps/ (Fall Gelb, invasion de la France)
http://www.mont-valerien.fr/de/comprendre/le-mont-valerien-pendant-la-seconde-guerre-mondiale/la-guerre-et-loccupation-allemande/?no_cache=1&P=1 (découpage France)
https://www.valka.cz/14763-Uspechy-a-prohry-vojenskeho-zpravodajstvi-Moskva-1941 (Barbarossa)
https://www.youtube.com/watch?v=APunZ3zeqcY&list=PL1Y_QqSigxGd2bhKcbMSqQSEVG6fiI4Mv&index=2&ab_channel=Historicus (vidéo Youtube montrant l’avancée de la guerre sur une carte)
https://www.beastsofwar.com/flames-of-war/battle-kursk-75th-anniversary-part-one-games-background/ (front avant Koursk)
https://www.nationalww2museum.org/war/articles/pacific-strategy-1941-1944 (plans simultanés)
http://www.encyclopedie.bseditions.fr/image/article/carte/NAZICARTUSAS0001.jpg (guerre du Pacifique de 1942 à 1945)