Introduction

Le Discours de la servitude volontaire est un ouvrage majeur du XVIe siècle qui aura eu une influence vertigineuse sur la philosophie politique de l’époque jusqu’à notre ère. Rédigée par Étienne de la Boétie alors qu’il n’était âgé que de 16 ou 18 ans, cette œuvre majeure est une véritable Ode à la liberté qui nous expose toutes les ficelles de la tyrannie et des régimes totalitaires et nous propose des leviers de contre-pouvoir.

Nous tenons à rappeler encore une fois que nous ne faisons ici qu’une présentation subjective de cet ouvrage. Nous vous livrons simplement notre ressenti et notre analyse tout en vous offrant la possibilité de nous partager les vôtres dans l’espace commentaire dédié en bas de cet article. Nous encourageons toujours l’honnêteté intellectuelle et tentons toujours d’être le plus objectif et transparent possible avec nos lecteurs. Nous sommes dans une démarche d’ouverture et d’instruction, pas d’idéologie. The Conservative Enthusiast est une plateforme d’apprentissage mais aussi de partage et nous tâchons toujours de nous rendre accessible et disponible pour notre communauté. La vérité seule nous importe. Cette introduction close, découvrons ensemble cet ouvrage.

Pourquoi lire Discours de la servitude volontaire ?

En plus d’être très bien écrite et très accessible, l’œuvre demeure intemporelle. Le discours de la servitude volontaire ouvre le débat sur la légitimité d’une autorité exercée sur une population et propose une analyse sur les raisons qui poussent cette population à lui obéir, à la servir voire à s’y soumettre. La Boétie met en lumière la façon dont un pouvoir peut se mettre en place et exercer une autorité sur un peuple. La thèse qu’il soutient est que contrairement aux idées reçues, la servitude n’est jamais forcée ou imposée mais en vérité parfaitement volontaire. Le titre « servitude » et « volontaire » n’est donc pas paradoxal mais prend ici tout son sens. La servitude est donc parfaitement acceptée par les deux camps, le tyran et le peuple. La servitude étant, pour imager, une sorte de contrat social impliquant l’adhésion des deux partis.

Si beaucoup pensent que l’obéissance est nécessairement imposée par la force ou la restriction, il semble pourtant difficilement concevable qu’un si petit groupe puisse exercer une telle pression sur un ensemble de citoyens prêts à obéir aussi docilement. La force n’est pas un moyen viable à long terme pour asseoir une autorité du petit nombre sur le grand nombre. Les probabilités de voir éclater en son sein des révoltes ou des rébellions sont bien trop importantes. D’autres stratégies sont donc privilégiées et nous sont livrées directement par l’auteur.

La thèse développée par La Boétie, certes subversive, résonne encore de nos jours comme un appel à la prise de conscience individuelle et collective, à la remise en cause du principe d’autorité et à la reconquête de la liberté.

Perçu par beaucoup comme le précepteur de l’anarchisme, la critique libertaire de La Boétie exige que les Hommes se réapproprient leur capacité d’autogestion en se fixant eux-mêmes des lois et des règles. Lutter pour l’autonomie politique permettant ainsi de sonner le glas de la servitude et de la domination.

À la différence d’Edward Bernays qui près de quatre siècles plus tard préféra placer son génie au service des institutions, des grandes industries et des lobbys ; La Boétie, en profond humaniste, met quant à lui son savoir au service du « peuple » et opte pour le développement d’une civilisation libre, autonome, consciente et proactive.

Lire cet ouvrage est donc primordial pour comprendre les mécanismes de la domination et pouvoir s’en défaire.

Mon avis

La période que nous traversons est particulièrement propice à la réflexion notamment au sujet de nos libertés. Sacrifiées sur l’autel de nouveaux idéaux du sanitairement et politiquement correctes, nos libertés, considérées acquises à tort, semblent nous échapper les unes après les autres sans qu’aucune véritable réaction ne soit constatée.

Une nouvelle fois, la thèse de La Boétie se vérifie à notre époque. Notre carcan est moral.

Ce n’est pas le tyran qui s’empare de la liberté, mais bien le peuple qui la délaisse et accepte de lui céder. La première cause de la servitude n’est donc pas le tyran mais la négligence du peuple. Un tyran seul ne peut exercer de pression suffisante pour faire courber l’échine à une majorité d’hommes sans que ceux-là soient résignés à servir consciemment. Le tyran n’est en place que par la servitude et l’obéissance du peuple. Le peuple est inéluctablement responsable de sa mise sous tutelle.

Comment expliquer alors qu’un peuple libre puisse céder sa liberté au tyran ? Le peuple est-il seulement fait pour être libre ? Rien ne permet à l’auteur de comprendre pour quelles raisons les hommes acceptent de renoncer à leur liberté. La paresse, la lâcheté, l’ignorance et la surabondance de confort me semblent-être des pistes qu’il serait judicieux de creuser.

La Boétie tente cependant d’apporter une réponse au phénomène de renoncement permanent de la liberté.

Si la force ne semble pas être un moyen durable pour asseoir une domination, le tyran doit ainsi trouver d’autres stratagèmes pour affaiblir le peuple et le dominer.

La première étape est d’engourdir le peuple en le distrayant. La Boétie prend l’exemple des théâtres et des passe-temps ludiques qu’il condamne, les qualifiant de « drogueries » et d’instruments de tyrannie. Panem et circenses. Du pain et des jeux. Le peuple s’encombre l’esprit de distractions et détourne le regard du tyran. Distrait, engourdi, le peuple n’a même plus conscience que l’argent soutiré ne sert qu’à financer ce qui le drogue un peu plus chaque jour et le maintien dans son état de mort-vivant. La surconsommation et l’abondance de loisirs condamnant petit-à-petit le peuple, non mécontent de s’enfoncer dans sa propre servitude.

Toute ressemblance avec notre ère n’est que pur hasard.

Mais l’amusement et le confort surabondant ne sauraient contenter ce que l’auteur qualifie « d’hommes bien nés ». Ces esprits clairvoyants, bien que minoritaires, ne savent se satisfaire de ces jeux pour ignorants sans éprouver ce besoin de conquérir, de bâtir quelque chose de grand à léguer. L’esprit droit et la connaissance leur permettent de se souvenir et de regarder derrière eux pour comprendre et juger le présent en anticipant l’avenir.

Ceux-là représentent le véritable danger pour le tyran puisqu’ils résistent et refusent de céder leur liberté, l’ayant savourée pleinement et désireux de la conserver. Le tyran doit alors veiller à élaborer une nouvelle stratégie pour maintenir sa domination et convaincre les esprits les plus vifs. Une nouvelle fois, ce n’est pas la force qui est utilisée, bien au contraire. Ce que le tyran ne peut combattre, il l’achète. Ainsi, ces hommes éclairés se voient proposer l’opportunité de dominer d’autres à leur tour, devenant complices de la tyrannie, perdant dans le même temps leur propre liberté. Ces hommes corrompus se pensent généralement à l’abris de toute disgrâce, flattant leur maitre qu’ils aiment servir. En réalité, seul le tyran demeure libre, ce système pyramidal lui permettant d’asservir des sujets qui en asservissent d’autres à leur tour.

La peur est également un excellent moyen d’asservir le peuple et de dissimuler l’illégitimité du tyran. Un peuple qui a peur est vulnérable et bien plus manipulable, et finit par s’auto-soumettre au pouvoir en place.

Toute ressemblance avec notre ère n’est que pur hasard.

La reconquête de la liberté nécessite donc la résistance et l’usage de la raison. La Boétie n’encourage aucune révolte populaire mais plutôt une désobéissance civile. Il écrit à ce propos :

« Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »

Gardons à l’esprit qu’aucune dictature n’est jamais imposée. La prison idéale est une prison sans barreau :

« Nul n’est plus esclave que celui qui se croit libre sans l’être. » Johann Wolfgang von Goethe

Gardons les yeux bien ouverts.

« La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude. » Aldous Huxley

 

Bienvenue dans la reconquête.

Bienvenue chez The Conservative Enthusiast.

Pour aller plus loin :

https://la-philosophie.com/discours-de-la-servitude-volontaire-analyse

https://fr.wikipedia.org/wiki/Discours_de_la_servitude_volontaire