Cet article fait suite au premier numéro sur le château de Chambord de notre liste de recommandations. Vous pouvez retrouver la liste TCE Patrimoine dès maintenant dans la rubrique Patrimoine de notre site.
Le château de Chantilly est un bijou du patrimoine français. Situé dans l’Oise, en région Hauts-de-France, il est l’œuvre d’Henri d’Orléans, duc d’Aumale, un homme au destin exceptionnel qui a magnifié et glorifié tout au long de sa vie l’héritage de ses illustres prédécesseurs, les Princes de Condé. Le Domaine de Chantilly a en effet appartenu à plusieurs dynasties princières qui ont permis son développement au fil des siècles. Le duc d’Aumale est le cinquième fils de la reine Marie-Amélie de Bourbon et du roi Louis-Philippe, dernier roi des français.
Un peu d’Histoire…
Aux origines du château
Façonné du Moyen Âge au XIXe siècle, le Domaine de Chantilly est intimement lié à l’Histoire de France.
Chantilly fut d’abord une forteresse médiévale construite sur un rocher en terrain marécageux dans la vallée de la Nonette, contrôlant la route de Paris à Senlis. Le château appartenait à Guy de Senlis, bouteiller du roi Louis VI entre la fin du XIe siècle et le début du XIIe siècle. Sa famille le conservera jusqu’au XIVe siècle. La Guerre de Cent Ans faisant des ravages dans la région, le château est pillé en 1358 lors des Jacqueries et sera vendu en 1386 à la famille d’Orgemont. Celle-ci entame la reconstruction du château et fait édifier une véritable forteresse. Le domaine ne sera dès lors plus jamais vendu mais hérité pendant trois générations, du XIVe au XVe siècle. C’est en 1484 que Pierre III d’Orgemont, sans enfant, lègue Chantilly à son neveu Guillaume de Montmorency.
La période de la Renaissance
La puissante famille Montmorency possède le Domaine du XVe au XVIIe siècle et y réalise d’importants travaux de modernisation. Le plus illustre membre de cette famille, Anne de Montmorency, compagnon d’armes et ministre de François Ier, décide de faire construire un château de plaisance par l’architecte Jean Bullant, qui avait travaillé notamment sur le château d’Écouen. Anne de Montmorency étant très inspiré par les nombreux palais rencontrés au cours des guerres d’Italie, le château est construit dans un style de la Renaissance française fortement influencé du style de la Renaissance italienne.
L’époque classique
En révolte contre Richelieu, ministre de Louis XIII, Henri II de Montmorency est exécuté à Toulouse en 1632 et le château est confisqué par le roi. En 1643, Anne d’Autriche le restitue à Charlotte de Montmorency, épouse d’Henri II de Bourbon, prince de condé. Chantilly passe ainsi à la maison de Condé, branche cadette de la maison de Bourbon. Leur fils, Louis II de Bourbon, dit « le Grand Condé », organise à Chantilly une vie de cour aussi brillante que celle de Versailles et convie les plus grands artistes de son temps tels que Molière, Racine, La Fontaine, Bossuet ou encore La Bruyère. C’est à cette période qu’il aménage en outre les somptueux « jardins à la française ».
La Révolution
Lors de la Révolution, le château est envahi par un groupe de gardes nationaux et vidé de son mobilier. Le Petit Château est transformé en prison sous la Terreur et les jardins sont laissés à l’abandon. Une partie du château est vendue entre 1793 et 1795, comportant l’ancien potager, le jardin des cascades, les terrains longeant l’actuelle rue du Connétable et les maisons de la ville appartenant au prince. Le Domaine est démantelé et le château est acheté par la Bande Noire dans le but de raser les bâtiments pour en vendre les pierres. Seul le Grand Château est démoli. Les Grandes Écuries seront sauvées de la destruction et très peu abimées étant occupées par l’armée.
Au temps du XIXe siècle
En 1830, le duc de Bourbon ayant perdu son fils ; le duc d’Enghien, fusillé sur ordre de Bonaparte, désigne son petit-neveu Henri d’Orléans comme hériter. Le Grand Château a alors presque disparu. En 1875, le duc d’Aumale entreprend alors des travaux de reconstruction considérables et fait appel à l’architecte Honoré Daumet. De 1876 à 1882, il fait reconstruire le château sur son sous bassement moyenâgeux et y rassemble une impressionnante collection d’œuvres d’art. Sans héritier, ayant perdu ses deux fils, Henri d’Orléans lègue la totalité de son domaine à l’Institut de France en 1886. Le Domaine ouvre ses portes au public le 17 avril 1898 sous le nom de « musée Condé », moins d’un an après sa mort et conformément à sa volonté.
Pourquoi visiter le Domaine de Chantilly ?
En plus d’appartenir à la très riche Histoire de France, le domaine de Chantilly est splendide. Le moindre recoin est une source de curiosité et d’émerveillement. Nos photos prises sur place peuvent en témoigner. Au XIXe siècle, le duc d’Aumale rassemble la plus importante collection de peintures anciennes, juste derrière le Louvre. On y retrouve plus de huit cent tableaux français, italiens et orientaux, mais aussi la plus grande et la plus complète collection de portraits français de la Renaissance au monde. Vous pouvez ainsi admirer des portraits de rois et reines de France du XVIe siècle, comme par exemple celui de François 1er.
Lieu incontournable du XVIIIe siècle, les appartements historiques des princes de Condé sont également sublimes et rivalisent avec ceux de Versailles. On y retrouve des lambris blancs et ors typiques de cette époque ainsi qu’une très riche collection de mobilier royal.
L’antichambre de l’appartement des princes de Condé, qui donne sur la galerie, aussi appelée La Grande Singerie, est remarquable par son style chinois et très exotique.
La galerie est une pièce grandiose. Décorée au XVIIe siècle par l’architecte de Versailles, Jules Hardouin-Mansart, on y retrouve des tableaux qui montrent les grandes batailles gagnées par le grand Condé. À l’extrémité de la galerie se trouve la Rotonde, qui présente les chefs-d’œuvre de la Renaissance italienne. C’est, à titre personnel, une des plus belles choses que j’ai vu de ma vie. L’art à son paroxysme, le souffle coupé, la contemplation.
Dans le Sanctuaire, se trouvent de surcroît deux chefs-d’œuvre de la peinture réalisés par le célébrissime Raphaël, artiste majeur de la Renaissance italienne, que sont Les Trois Grâces et La Madone d’Orléans. On peut y admirer aussi un ensemble complet de quarante enluminures médiévales de Jean Fouquet, ce qui représente le summum de la peinture sur parchemin typique du XVe siècle.
Si vous hésitez encore à vous y rendre, sachez que ces œuvres ne sont visibles que sur place, le testament du duc d’Aumale stipulant que nul ne peut ni modifier la présentation ni prêter les œuvres hors de Chantilly.
Autre pièce incroyable, la bibliothèque. Cette salle magnifique abrite plus de soixante mille ouvrages, le livre étant la passion du duc d’Aumale. Il fait également aménager une deuxième pièce, le cabinet des livres, pour y disposer les trésors de sa collection comme par exemple Les très riches heures du duc de Berry, un des manuscrits les plus célèbres au monde surnommé La petite Joconde de Chantilly.
Au cours de votre visite, vous découvrez également les galeries du château. La première, la Galerie de Psyché, comporte quarante-quatre vitraux en grisaille relatant l’Histoire de Psyché, issue de l’Âne d’Or d’Apulée.
La seconde, la Galerie des Cerfs, aménagée à la fin du XIXe siècle, fait office de salle à manger de réception. C’est dans cette salle au style caractéristique de la Renaissance que le duc d’Aumale accueillait le dimanche toute l’élite artistique et intellectuelle de son temps. La chasse étant leur loisir favori, elle fait partie intégrante du décor et de l’ambiance si particulière de cette salle admirable.
Les jardins valent également le coup d’œil. Ils se distinguent par l’étendue exceptionnelle de leurs bassins et le nombre de leurs jeux d’eau. Le Grand Canal est une réalisation monumentale qui dépasse de six cent mètres celui de Versailles.
Le jardin à la française se distingue par son tracé géométrique et symbolise le triomphe de l’ordre sur le désordre. Au contraire du jardin anglais, qui refuse la géométrie et opte pour des perspectives grandiloquentes chères au romantisme. On peut y apercevoir des fabriques romantiques telles que des références à Éros et le Temple de Vénus entre autres. Ce temple s’inspire de ceux des gréco-romains et abrite une copie d’une statue antique représentant Vénus, la déesse de l’Amour et de la Beauté.
Dans une partie du parc boisé, vous tomberez nez-à-nez avec ce qu’on surnomme « La Maison de Sylvie ». Bordée d’un étang dans un lieu ombragé, cette petite maison logea notamment le poète libertin Théophile de Viau, frappé par la censure, protégé par les Montmorency.
Vous pourrez enfin admirer L’île d’Amour, implantée sur le site d’un ancien lieu de fêtes des Princes de Condé. Aménagée par le duc d’Aumale au XIXe siècle, cette petite île magnifique bordée de fontaines et de buis tire son nom d’Éros, dieu de l’Amour, où se trouve sa statue.
N’oubliez pas de visiter les Grandes Écuries, véritable chef-d’œuvre architectural du XVIIIe siècle qui présente la relation entre l’homme et le cheval depuis le début des civilisations et qui propose toute l’année des spectacles équestres consacrés à l’art du dressage.
Bien évidemment, cette petite énumération est non exhaustive et bien d’autres surprises vous attendent sur place. Nous ne pouvons que vous recommander ce site et vous encourager à le visiter pour en apprécier toutes les richesses. Nous pouvons être reconnaissants du duc d’Aumale pour ses précautions testamentaires qui ont permis, plus d’un siècle plus tard, de préserver et de magnifier un écrin de richesses où le charme de l’époque continue d’opérer et saura émerveiller les amoureux de la France et de son Histoire fascinante.
Pour aller plus loin :
Notre objectif chez TCE est bien sûr de vous pousser à visiter nos recommandations et vous inviter à renouer avec l’héritage Français et Européen. Nous avons pleine conscience que c’est en connaissant ses racines et son identité, que l’on est plus à même de s’épanouir, se défendre et prospérer.
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